Les Tigres Libérateurs de l'Eelam Tamoul (TLET)  
     
 

D) Analyse critique

 
     
 

I. Réflexion concernant les sources d'informations

Comme on l'a déjà mentionné auparavant, la guerre que mènent les TLET au Sri Lanka en est d'abord une de propagande puisque le groupe semble avoir conscience qu'il ne pourra constituer un État légitime et reconnu par la communauté internationale par le simple recours aux armes et à la force. Il serait normal de s'attendre à ce que cette guerre de propagande soit en fait bidirectionnelle.

Dans un tel contexte, il faut demeurer prudent face aux conclusions que l'on peut tirer à partir des informations pouvant être récoltées sur le conflit. Il est indéniable que les Tigres tamouls tentent de justifier leurs actions par l'oppression militaire et par les atteintes à leurs droits fondamentaux dont ils seraient victimes depuis que les Cinghalais auraient instauré une une « dictature de la majorité » à partir de 1948 (Sri Lanka, 2005 ; Tamil Eelam Homepage, 2005). Le mimétisme, stratégie souvent déployée par les forces de l'ordre, est éaglement prévisible dans ce contexte. C'est ainsi que des activités de propagande sont vraisemblabment pratiquées, à un degré qu'il reste à déterminer, par le gouvernement sri lankais et par les groupes qui dénoncent les TLET. La prudence est donc de mise dans l'utilisation que l'on fait des informations disponibles, ce qui est d'autant plus gênant dans un contexte où la rareté des sources d'informations rendent les corroborations parfois difficiles.

Il est difficile d'obtenir des renseignements sur les activités des Tigres des neiges au Canada. L'ouvrage de Bell (2004) constitue une exception notable et intéressante, mais son utilisation éveille du même coup une certaine crainte. C'est que Bell y critique vivement les autorités canadiennes et rapporte que les TLET sont très actifs au Canada alors que la guerre qu'ils mènent se déroule essentiellement de l'autre côté du globe terrestre. L'auteur se permet de faire plusieurs affirmations en fournissant rarement des références claires, sans compter qu'il se sert fréquemment de sources fermées. Ainsi, il consacre un chapitre d'environ 68 pages aux « Tigres des neiges », pour lequel il fournit une bibliographie qui ne contient que quinze documents. Parmi ceux-ci, sept seraient classés comme étant « secret », « confidentiel » ou « protégé A ». Bell étant correspondant en chef au National Post, il est associé aux reportages d'enquête et le mystère demeure concernant les méthodes qu'il aurait pu employer pour se procurer les documents qu'il prétend avoir en sa possession.

 
     
 

II. Analyse explicative : les causes du terrorisme tamoul au Sri Lanka et les objectifs poursuivis

a) Les TLET : un mouvement nationaliste

Sageman (2004 : 69) rapporte que la recherche qui tente d'expliquer pourquoi certains individus finissent par s'impliquer dans des activités terroristes peut être divisée en trois grandes approches. La première réside dans le milieu de vie et d'origine des terroristes : c'est la thèse sociologique. La deuxième stipule que les terroristes partagent un profil psychologique particulier. Selon la troisième option, certaines personnes s'engagent dans le terrorisme parce qu'elles se retrouvent dans une situation fort particulière au moment de leur recrutement. Sageman consacre les pages suivantes à tester chacune de ces trois approches à l'aide d'informations qu'il a colligé sur le plus grand nombre possible de « Mujahedin ».

Une telle démarche serait extrêmement intéressante à effectuer avec des membres des TLET, mais nous ne disposons pas des informations nécessaires sur un nombre suffisant d'individus pour la réaliser. Ainsi, les explications psychologiques et situationnelles ne peuvent tout simplement pas être analysées dans le cadre du présent travail. Quant à la thèse sociologique, nous ne pouvons l'aborder d'un point de vue « micro » en nous attardant à l'origine sociale de membres des TLET. Nous pouvons cependant, au niveau « macro », aborder une réflexion sur le contexte social qui a permis ou favoriser l'éclosion d'un tel mouvement.

Ainsi, Schmid et Jongman (1988) rapportent des théories sociologiques selon lesquelles on peut distinguer les précipitants, qui sont normalement des événements ponctuels qui amorcent les débordements de violence, des preconditions qui sont les circonstances rendant possible les précipitants menant à la violence.

En résumant et en simplifiant la situation, il semble probable que les manquements de respect de la part de la majorité cinghalaise envers les droits de la minorité tamoule, tels que perçus par ces derniers (c'est bien la la perception d'injustice, et non une injustice que nous pourrions tenter d'évaluer objectivement, qui est le moteur de l'action), aient créé un climat social favorable à l'émergence du terrorisme (préconditions) durant les années 1950, 1960 et 1970. Les émeutes et les bagarres de 1983 représenteraient l'élément précipitant ayant mis le feu aux poudres, le cycle terreur-répression n'ayant jamais connu une fin (est-ce vraiment une fin?) lors de la signature de l'accord de cessez-le-feu en 2002.

Dans ce cadre, le mouvement des TLET s'incrit clairement comme étant un mouvement séparatiste, nationaliste, visant la création d'un État indépendant pour les tamouls du Sri Lanka. Cet objectif est d'ailleurs énoncé clairement par les Tigres tamouls sur leur propre page Internet (Tamil Eelam Homepage, 2005).

b) Les TLET : un mouvement marxiste?

Bien que l'ensemble des sources d'informations considère les TLET comme étant un mouvement puissant, fort bien structuré au niveau international et ayant d'abord et avant tout des visées nationalistes (la création de l'Eelam tamoul), cette vision des TLET ne fait pas l'unanimité.

En 1986, Tremayne et Geldard publiaient un petit document qui offre une toute autre vision des Tigres tamouls. Penelope Tremayne est en fait une journaliste britannique qui serait allée pesonnellement au Sri Lanka afin de rencontrer des membres des TLET. En écrivant leur document, les auteurs savaient déjà qu'ils prenaient position à contre-courant puisqu'ils affirment (p. 11) que jusque là, les événements se déroulant au Sri Lanka ont été assimilés à une stratégie séparatiste ou d'insurrection. Selon elle, l'établissement de l'Eelam tamoul est vu par les dirigeants des TLET comme n'étant qu'une étape intermédiaire en vue d'atteindre l'objectif réel de leur mouvement : la création d'un État marxiste contrôlant l'ensemble de l'île du Sri Lanka (Tremayne, 1986, p. 13 et 14).

Toujours à contre-courant, les auteurs affirment que les Tigres tamouls ne sont pas très impressionnants si on les compare à d'autres organisations similaires. Ils les décrivent (1986 : 15) comme étant un groupe mal dirigé, principalement composé de jeunes hommes qui se sont impliqués dans cette organisation parce qu'ils se retrouvaient humiliés dans leur village natal, souvent incapables de se trouver un emploi malgré une éducation considérable. Ils rajoutent que les militants des TLET ne trouvent pas leur motivation dans la création de l'Eelam tamoul, mais plutôt dans le mode de vie que l'organisation leur permet d'adopter. En effet, être un membre des Tigres tamouls leur permet d'éprouver un certain sentiment de supériorité, d'avoir de l'argent, d'éprouver un fort sentiment d'appartenance à un groupe, d'être bien logés et nourris, etc.

Ainsi, Tremayne et Geldard semblent avoir succombé à la paranoïa soviétique commune des années 1980 comme le démontre ce passage :

Eelam is only another of the petty movements used as pretexts for Soviet advances into "soft" territories where it is thought that resistance will not be effective, or western support for the defenders will not be subssantial (1986, p. 18).

Aujourd'hui, environ quinze ans après la chute de l'empire soviétique, devant l'évidence que les Tigres tamouls constituent toujours une menace pour le gouvernement du Sri Lanka, et devant les éléments qui tendent à démontrer la structure de l'organisation internationale des TLET, cette vision de l'organisation terroriste perd de sa crédibilité. Cependant, la démonstration est faite qu'un même mouvement peut être perçu de façon fort différente selon le contexte dans lequel il est étudié et selon l'angle d'approche de la personne qui étudie le phénomène.

 
     
 

III. Application et réflexions concernant les typologies

Différents auteurs ont proposé des typologies du terrorisme et il serait intéressant de les tester avec les activités des TLET. Ainsi, en 1982, Schmid et de Graaf proposaient une typologie en trois étapes :

 
 

Source : Le terrorisme

 
     
 

Une telle typologie peut être critiquée, notamment sur la question de la définition du « criminel ». En effet, il y a lieu de réfléchir sur la place qu'occupe la criminalité dans le terrorisme, ou parallèlement au terrorisme. La criminalité peut d'abord être un moyen à la disposition des terroristes servant à financer leurs activités. C'est le cas, par exemple, du trafic de drogues. D'autre part, la criminalité peut n'être qu'une conséquence directe ou collatérale des activités terroristes. C'est le cas des morts causés par un attentant à la bombe. Ces activités criminelles sont probablement présentes dans toutes les formes de terrorisme, notamment celui à connotation politique. Ainsi, que serait le terrorisme criminel et qu'est-ce qui le différentierait du crime organisé? N'aurait-on pas intérêt à distinguer davantage les concepts de criminalité et de terrorisme si l'on veut étudier ce dernier de façon spécifique et en dégager éventuellement les causes? C'est ainsi que la notion de terrorisme criminel proposée par Schmid et de Graaf apparaît discutable.

À première vue, cette typologie rend compte des activités des Tigres tamouls qui peuvent aisément être placés dans le sous-groupe 1.1.b. du tableau 2 ci-dessus. Du moins, il ne faisait aucun doute jusqu'en 2002 (avant le cessez-le-feu) que les TLET constituaient un groupe d'insurgés, à forte motivation politique séparatiste. Rappelons à cet effet que le but premier des TLET est la création d'un État tamoul indépendant au Sri Lanka, dénommé l'Eelam tamoul. Cependant, il faut garder à l'esprit que bien que les Tigres tamouls aient déjà perpétré des attentats terroristes en sol sri lankais, les activités qu'ils y menaient jusqu'en 2002 pour obtenir leur indépendance relevaient plutôt de la guérilla alors qu'ils affrontaient l'armée dans des combats de style militaire. D'autre part, les TLET ont déjà également été à l'origine d'attentats terroristes en sol étranger, mais la majorité des activités qu'ils mènent au niveau international relève plutôt de la criminalité organisée et de la collecte de fonds en apparence légale. Les TLET représentent clairement l'exemple d'un groupe prêt à utiliser n'importe quel moyen pour arriver à ses fins, sachant manoeuvrer autant dans les activités de terrorisme que dans les activités criminelles ou guerrières.

 
 

 

 
 

IV. Application des théories criminologiques

On peut se demander si la criminologie parvient à expliquer les causes du terrorisme et les activités des terroristes, ces derniers devant presque irrémédiablement s'engager dans des activités criminelles s'ils veulent atteindre leurs objectifs. Entre autre, les terroristes mettent souvent rudement à l'épreuve les théories du choix rationnel puisqu'ils recherchent souvent autre chose qu'un gain financier ou un plaisir immédiat (pour en savoir davantage sur les théories du choix rationel, voir notamment Clarke et Cornish, 2000 et Felson, 1998). Certains pourraient être tentés d'affirmer que par leurs actions, les terroristes agissent rationnellement afin d'acquérir du pouvoir politique. Bien que cette interprétation puisse tenir la route pour certaines organisations lorsqu'on les prend dans leur ensemble, elle n'explique pas comment certains individus en viennent à sacrifier leur propre vie pour la cause de leur groupe, mettant définitivement un terme à toute leurs ambitions, qu'elles soient politiques ou autres.

Plus fondamentalement, les théories du choix rationel ne nous expliquent rien sur les causes de la délinquance (et, par extension, du terrorisme) puisque la rationalité y est décrite comme étant objective-universelle. À ce sujet, il faut comprendre que ces théories ne portent aucun jugement sur les buts poursuivis par les individus. Ce qui est considéré comme étant rationel, ce sont les moyens pris par les individus pour atteindre les objectifs qu'ils se sont fixés. Ainsi, sera jugé rationel un individu qui commet un vol pour se procurer de l'argent puisque le moyen qu'il prend lui permet d'atteindre son objectif. Cependant, cela n'explique pas pourquoi certains individus vont effectivement commettre un vol alors que d'autres vont préférer travailler légitimement, faire un emprunt ou tout simplement se priver d'argent.

La théorie de l'anomie de Merton (1970) constitue une base criminologique plus intéressante permettant de regarder les activités des TLET sous un angle nouveau. Merton reprend le concept des buts et des moyens en suggérant qu'une structure sociale peut pousser les individus à mettre plus ou moins d'emphase sur les buts à atteindre ou sur les moyens qui peuvent être pris pour atteindre ces objectifs. Le tableau 3 ci-dessous résume la typologie qu'il a développée et qui se base sur les modes d'adaptation des individus aux exigences de la société.

 
     
 
Typologie des modes d'adaptation individuelle
Mode d'adaptation
Buts
Moyens
I. Conformisme
+
+
II. Innovation
+
-
III. Ritualisme
-
+
IV. Évasion
-
-
V. Rébellion

±

±

Merton, R. K. (1970). « Structure sociale, anomie et déviance », Szabo, D. (éd.) : Déviance et criminalité, Paris : Armand Colin, 143.
Légende :
+
Acceptation
-
Refus
±
Refus des principales valeurs et introduction de valeurs nouvelles

 

 
 

Selon ce modèle, une société demeure stable lorsqu'un fort pourcentage de la population est du type conformiste, c'est-à-dire lorsqu'elle est composée d'individus qui acceptent autant les objectifs proposés par la société que les moyens adéquats pouvant être pris pour y arriver :

Dans un système compétitif la distribution des statuts doit être organisée de manière qu'il y ait pour chaque position, à l'intérieur de la hiérarchie sociale, des stimulants qui incitent l'individu à accepter les obligations correspondantes. Sinon, comme nous allons le voir, on verra se multiplier les comportement déviants (Merton, 1970, p. 136).

Nous passerons rapidement sur les modes ritualiste et évasif, ces derniers étant moins suceptibles d'engendrer chez les individus le passage à l'acte terroriste. En effet, le ritualisme entraîne un grand respect des normes, éclipsant les ambitions des individus qui intériorisent ce mode d'adaptation. Merton rapporte d'ailleurs une série de clichés (1970, p. 155) qui illustrent le ritualisme social : « je me contente de ce que j'ai », « ne vise pas trop haut et tu ne seras pas déçu », « je ne prends pas de risques ». On pourrait certainement ajouter le célèbre « je suis né pour un petit pain ». Ceux qui éprouvent autant de respect pour les règlements, au point de renoncer aux ambitions qu'ils pourraient autrement poursuivre, ont de toute évidence un faible potentiel de s'adonner à des activités terroristes. Quant au mode évasif, il s'agit vraisemblablement du mode d'adaptation le plus rare au sein de la société. Merton (1970, p. 158) associe ainsi les gens qui n'agissent pas selon les normes et qui ont abandonné les buts prescrits par la société aux malades mentaux, aux hallucinés, aux exilés, aux errants, aux clochards, aux drogués, etc. Bien que ces individus puissent facilement tomber dans la criminalité, leur manque de vison et d'objectifs n'en font pas de bons candidats au terrorisme.

Demeurent les modes innovatif et rebelle qui ont un pouvoir explicatif intéressant. « L'innovation » se produit lorsqu'un individu atteint les buts prescrits par la société sans respecter les façons de faire habituelles. En d'autres mots, ceux qui adoptent ce mode ont pour adage que la fin justife les moyens. Merton est d'avis que notre société est susceptible d'engendrer ce mode d'adaptation puisqu'elle accorde une grande importance au succès, qui est souvent évalué à la richesse et/ou au pouvoir que détient un individu. L'innovation peut être vue comme étant positive, par exemple s'il s'agit d'une astuce commerciale inédite sans être nécessairement illégale. Elle peut cependant être perçue négativement lorsqu'il s'agit d'activités criminelles comme la corruption, la fraude et le trafic de drogues. Il faut alors réfléchir à la structure sociale et aux possibilités qu'elle offre aux différentes classes sociales d'atteindre les objectifs désirés que sont le pouvoir et la richesse. Le pouvoir politique, spécialement, est à la portée d'un groupe restreint de gens et apparaît innacessible pour d'autres sauf par la voie du terrorisme. Le terroriste serait ainsi celui qui, comme beaucoup d'autres, désire détenir un certain pouvoir politique. Étant incapable ou trouvant trop long et trop complexe d'obtenir ce pouvoir par les canaux réguliers et légaux, il préfère la voie du terrorisme, un moyen parmi tant d'autres qu'il peut se permettre d'employer étant donné son mode d'adaptation : innovatif.

Quant au mode rebelle, Merton reconnaît qu'il ne s'agit pas là d'un mode d'adaptation au contexte social à proprement parler, puisqu'il s'agit plutôt d'une tentative visant à changer la structure sociale et à institutionnaliser des buts et/ou des moyens nouveaux. L'objectif des terroristes seraient alors beaucoup plus profond que la simple acquisition du pouvoir politique. Merton rajoute que l'on peut s'attendre à voir des individus se rebeller lorsque les institutions sont considérées comme étant des obstacles à la réalisation de buts légitimes (1970, p. 161). Or, le terrorisme est souvent l'arme ultime des rebelles qui n'ont autrement aucun moyen (par les insitutions déjà en place) d'imposer leur vision et leur volonté aux autres membres de la société.

On peut reconnaître dans les modes innovatif et rebelle des éléments qui sont à la base du terrorisme tamoul au Sri Lanka : des militants qui veulent obtenir un État indépendant pour assurer l'auto-détermination du peuple qu'ils représentent et qui ont acquis la certitude que cette indépendance ne pourra pas être obtenue par le biais des institutions sri lankaises actuelles étant donné la composition démographique du l'île du Sri Lanka. En manque de pouvoir politique légitime, les TLET ont estimé qu'ils n'avaient pas le choix, pour arriver à leur fin, que d'utiliser la violence et la terreur. Bien que l'organisation dans son ensemble puisse être considérée comme étant du type rebelle (la création d'un État nouveau...), il y a fort à parier que certains membres des TLET n'ont joint les rangs que pour l'obtention d'un certain prestige et d'une certaine richesse qu'ils n'auraient pas pu atteindre autrement que sur ce mode s'approchant beaucoup plus de l'innovation.

Le cessez-le-feu de 2002 pourrait être un signe que les TLET aient pris conscience que la fin ne doit pas toujours justifer les moyens. À moins que Thompson (2002) ait raison de croire que les Tigres tamouls ne profitent de la situation pour se réarmer et pour préparer diverses offensives majeures, tout comme ils l'ont déjà fait lors d'accords de cessez-le-feu antérieurs.

 
     
 
 
 
 
   
 
2002-2014, ERTA