Fonctions connexes des activités de financement

 
     
  Partie 1: Typologie conventionnelle des groupes terroristes  
     
 

Dans le but de mettre à jour les modes d'opération de certains groupes actifs au Canada et pour mieux saisir quelles sont les activités de financement qui ont leur préférence, nous proposons une nomenclature somme toute assez classique des groupes terroristes. Les catégories proposées visent simplement à préciser que les motifs et les modalités d'opération des individus et des groupes terroristes, loin d'être le seul fait du hasard, seraient plutôt révélateurs des conditions historiques, politiques, sociales, économiques, culturelles et religieuses qui ont favorisé leur émergence. De plus, les groupes terroristes adoptent des modus operandi qui sont propices à la poursuite de leurs actions sur la base des opportunités et des contextes qui se présentent sur un territoire donné.

1.1 Les groupes terroristes religieux

  • Dans un groupe terroriste religieux les objectifs s'inscrivent dans une stratégie à long terme et les mécanismes de légitimation sont susceptibles de revêtir des formes particulières.
  • Par exemple, certains actes sont commis en conformité avec des principes d'inspiration religieuse et se justifient sur la base de leur capacité à faire avancer la cause, la guerre sainte. On pense notamment aux enlèvements, aux extorsions, au recours à des trafics de grande envergure empruntant les routes ancestrales de territoires historiques. Dans un tel contexte, la religion joue un rôle particulier, il s'agit d'une force légitimatrice. Ce sont des impératifs mystiques qui guident les acteurs du groupe qui peuvent trouver des échos de leurs aspirations dans les discours de certains leaders religieux contemporains. Le combat est donc autant physique que métaphysique.
  • La lutte est ancrée dans un long processus dont l'origine remonte à la nuit des temps.
  • Certains États cautionnent et offrent un refuge aux membres du groupe et à leurs sympathisants.
  • Le groupe est hautement organisé et peut compter sur l'aide de plusieurs associations qui épousent les mêmes interprétations de la lutte et qui s'inspirent des mêmes écrits religieux.

1.2 Les groupes terroristes politiques

  • les actes terroristes sont un moyen de faire connaître des revendications aux autorités concernées et au public.
  • Les liens qui unissent les participants sont consolidés en raison de fortes appartenances ethniques, nationalistes, voire séparatistes. Il y a un objectif en mesure de galvaniser les membres du groupe et les opposants sont identifiés. Le caractère spécifique et légitime du conflit motive les membres de l'organisation à poursuivre la lutte jusqu'à ce qu'une entente ou un changement leur donne satisfaction.
  • Les actions devraient cesser lorsque le but est atteint puisqu'il s'agit de (re)prendre un pouvoir et de s'approprier un pays, sur le plan physique et symbolique en contrôlant, par exemple, ses propres institutions
  • Les revendications sont politiques et visent essentiellement à faire valoir les différents points de vue de factions s'estimant lésées par le processus démocratique. En effet, certains groupes affirment que les voies démocratiques ne suffisent pas pour faire avancer leur cause et, c'est dans un tel contexte que la lutte armée a pour dessein de susciter un changement dans la manière de gérer les affaires gouvernementales. Ainsi, les groupes terroristes politiques tentent de faire reconnaître la légitimité de leur lutte en insistant sur la validité de leur culture, de leur langue et dans certains cas, ils essaient de reconquérir un territoire que des bouleversements récents ou lointains leur ont enlevé.

1.3 Les groupes à cause unique

Certains groupes sont formés autour d'une cause unique comme la suprématie de la race blanche, la protection de l'environnement ou les droits des animaux. Tout en ayant recours à des moyens de fortune, ils réussissent à construire des engins explosifs en utilisant, par exemple, des instructions sur Internet. Les produits servant à la fabrication de leurs bombes artisanales se trouvent en vente libre sur le marché. Le but visé est l'action d'éclat. Ils peuvent donc agir « à l'aveugle » sans planifier nécessairement leur retraite ou l'après attentat, contrairement aux groupes structurés et organisés qui laissent peu de détails au hasard. Le groupe est composé d'un amalgame plus ou moins circonstanciel d'individus partageant les mêmes aspirations, les mêmes convictions, et le cas échéant, la même religion (Hoffman, 1997). Les besoins financiers de ces groupes semblent généralement assez modestes.

1.4 Le terrorisme d'État

Le terrorisme d'État peut prendre trois grandes formes :

  • L'État se fait sponsor d'actes terroristes (Wieviorka, 1997). C'est notamment le cas de la Libye qui aurait subventionné des groupes extrémistes par l'intermédiaire de ses agents à l'étranger. Au Canada, Kinsella (1992) retrace le parcours de ces agents qui exercent un contrôle sur les étudiants libyens. Lorsque nécessaire, des actions punitives auprès des dissidents sont entreprises, par exemple, les obliger à suivre un entraînement dans un camp en Libye.
  • L'État exerce des actions répressives violentes. Ainsi, en matière de terrorisme d'État répressif, on peut penser à des exemples comme celui du Guatemala à l'encontre des paysans indiens ou à celui de la Turquie vis-à-vis des Kurdes (Chaliand).
  • L'États est engagé dans une lutte continue contre un autre et utilise comme stratégie l'attaque terroriste en territoire ennemi. Le conflit peut être ouvert ou latent. C'est dans un tel contexte que les États qui préfèrent rester dans l'anonymat engagent des individus ou des groupes pour accomplir une tache particulière. De fait, certains États peuvent faire appel aux services de terroristes « professionnels » (Hoffman) pour mener à terme des actions ciblées et ponctuelles, sans avoir à se faire connaître sur la scène internationale.
 
     
 
 
     
   
2002-2008, ERTA